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On ment aux enfants

2013

On ment aux enfants dès leur plus jeune âge. On leur ment pour les protéger, pour les garder dans leur petit cocon d’innocence. On leur ment parce que le monde nous fait peur, on les trouve encore trop purs pour les effrayer avec la réalité. Ou peut être qu’on leur ment parce qu’il est difficile pour nous de leur avouer la vérité.

La vérité d’un quotidien qui nous semble banal, qui nous semble normal. Mais quand l’enfant pose ses questions, nous réalisons que la vérité serait d’un tranchant trop acerbe pour être révélée à des oreilles si sensibles et non averties.

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L’enfant, curieux, aime la vie. Il pose tellement de questions qu’il devient souvent périlleux de tenter de répondre. Mais sa soif de connaissance ne fait que commencer. A défaut de trouver la bonne façon de dire ce qui peut être pénible, on va déformer la réalité, la modifier, l’enjoliver, l’atténuer. Pour que l’enfant accepte. Mais c’est le trahir. On ment pour qu’il accepte. Quand il sera suffisamment grand pour comprendre, ce sera trop tard. Il ne pourra rien rejeter. Il aura déjà accepté, depuis longtemps, et intériorisé au point de supporter de vivre chaque jour dans l’incohérence absolue. Il sera résigné avant même d’avoir su qu’il valait la peine de se battre. Orwell avait raison. 2 et 2 font 5. C’est aussi vrai que tout ce qu’ils racontent. Toi, petit enfant dont les oreilles sont encore épargnées de toute fabulation, sache que le monde n’est pas tel qu’on te le décrit. Personne ne te dira jamais la vérité. Pas même moi. Impossible d’assumer de telles atrocités.

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On ment aux enfants dès leur plus jeune âge. On leur ment pour les rendre heureux, pour leur apporter le sourire, la joie. On leur ment parce que le monde est trop compliqué, trop ennuyeux et particulièrement difficile si on n’est pas bien né. Le mensonge fait leur bonheur. Ou peut être qu’en leur mentant à eux on se ment à nous même. Vivre dans le mensonge n’a jamais fait le bonheur de personne. Alors on leur apprend aussi la frustration. Cette émotion contre balancera le plaisir artificiel et leur permettra d’avoir un repère. Mais n’est-ce pas là se leurrer ?

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Si nous ne vivions pas dans le mensonge, enterrés entre frustration et plaisir. Si nous cessions de mettre une muraille invisible entre l’être humain et la Nature. Si nous avions enfin une conscience globale nous permettant de faire resurgir en chacun de nous l’empathie, la compassion et l’amour.

Si l’on ne mentait pas aux enfants.

Si l’on ne se mentait pas à nous même…

Enfance innocence - Crédit photo : Bsaz
On ment aux enfants: Texte
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